En ce qui me concerne... - Exposition | mfc-michèle didier | Paris - Bruxelles - PARIS
Exposition du 9 janvier au 7 février 2015
Vernissage le 8 janvier 2015 de 18h à 21h en présence de l'artiste
Une toile tendue sur châssis, peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est accrochée.
Voici l'énoncé originel à partir duquel l'ensemble des définitions/méthodes de Claude Rutault se construisent depuis le début des années 1970, la définition/méthode étant le terme qu'il utilise pour désigner les écrits fixant le protocole de ses œuvres. En mars 1973, il repeint sa cuisine. C'est dans ce contexte somme toute assez ordinaire que l?artiste peint une toile de la même couleur que le mur de la pièce qu?il rénove, mur sur lequel la toile est accrochée.
Claude Rutault est peintre. Cependant, en instaurant avant toute réalisation picturale cet aujourd'hui célèbre protocole rédactionnel de la définition/méthode, il accorde une place prépondérante à l'écriture dans sa peinture.
Les définitions/méthodes en sont les exemples les plus notoires, mais il existe également dans le travail de Claude Rutault un ensemble conséquent d'écrits indispensables à l'appréhension de son œuvre. Marie-Hélène Breuil, auteur d'une thèse en histoire de l'art soutenue à Paris IV - Sorbonne en 2009 intitulée L'œuvre de Claude Rutault - définitions/méthodes: écriture, peinture, sociabilité, articule en partie son étude autour de l'hypothèse de l'élaboration d'une peinture écrite.
Léexposition En ce qui me concerne..., présentée à la galerie mfc-michèle didier, porte sur cette part constitutive - et considérable - de l'œuvre de l'artiste: la part écrite. Claude Rutault recourt, depuis le début des années 1970, à toutes formes d'imprimés - affiches, catalogues, livres, feuillets agrafés, cartons d'invitation - pour diffuser des textes de différente nature. L'idée même d'édition et de publication est au cœur de son œuvre.
« (...) depuis longtemps l'envie d'un livre qui rivalise avec la peinture, que l'écrit ne soit plus seulement un pont vers la peinture mais dispense de peindre, un livre qui ait les qualités visuelles, matérielles et cette portée irréductible d'une peinture, avec les armes qui sont les siennes, le papier, l'encre, les couleurs, les caractères, la typographie ».[1]
« (...) le lecteur/spectateur attentif se rendra compte que ces livres, catalogues ou fascicules vont bien au-delà de simples recueils de textes, de consignes. C'est une recherche formelle qui lie de façon conceptuelle ses écrits à sa démarche picturale »[2]. Claude Rutault cite Guy Schraenen dans sa «bibliographicitation 1973-2000 » publiée dans définitions/méthodes le livre.
À propos de la citation, vous remarquerez qu'elle est utilisée ici abondamment. Marie-Hélène Breuil souligne très justement, dans son Entretien écrit avec Claude Rutault[3], qu'il est difficile d'écrire sur l'œuvre de l'artiste «sans être dans la reprise» de ses propres commentaires ou dans la citation directe.
L'écrit est omniprésent. Il participe au renoncement de Claude Rutault à être peintre au sens traditionnel du terme, il lui permet d'abandonner les prérogatives liées à ce statut, de se dessaisir de l'autorité sur l'œuvre sans se dessaisir de l'œuvre.
La définition/méthode de 2009, intitulée premières pages I, met en avant ouvertement l'idée de publication, elle constitue l'essentiel de l'énoncé: « (...) l'œuvre est un livre ayant pour centre d'intérêt une peinture, il (le preneur en charge[4]) est l'auteur de l'un des livres qui va vers le Livre, c'est à dire l'œuvre avec une majuscule. Le Livre à l'image de la Peinture dont il parle, reste à venir ». premières pages I est un nouveau renoncement auquel Claude Rutault aspire, celui du «renoncement à avoir le dernier mot »[5].
L'exposition En ce qui me concerne... est une « prise en charge » de l'exposition imprimés 1973-2013, conçue par Didier Mathieu et présentée au Centre des livres d'artistes de Saint-Yrieix-la-Perche.
Elle sera présentée du 9 janvier au 7 février 2015 et son vernissage se déroulera le jeudi 8 janvier de 18h à 21h, en présence de l?artiste.
Le vernissage à la galerie mfc-michèle didier sera également l?occasion du lancement du catalogue de l'exposition de Claude Rutault imprimés 1973-2013 édité par le Centre des livres d'artistes de Saint-Yrieix-la-Perche et dirigé par Marie-Hélène Breuil et Didier Mathieu. Il prendra la forme d'un catalogue raisonné des livres, publications, ephemera et autres imprimés de l'artiste.
[1] Claude Rutault, seconde livraison (entrée « catalogue »), la peinture fait des vagues, Musée des beaux-arts de Brest, 2007
[2] Guy Schraenen, Claude Rutault bibliographie 1998, Neues Museum Weserburg Bremen, Brême, 1998
[3] Claude Rutault, Michel Gauthier, Marie-Hélène Breuil, Flammarion, 2010
[4] Le preneur en charge est le terme choisi par Claude Rutault pour identifier l?acquéreur d?une définition/méthode. Le preneur en charge a une part active dans l?existence de l??uvre de l?artiste.
[5] Claude Rutault, Michel Gauthier, Marie-Hélène Breuil, Flammarion, 2010
Note biographique sur l'artiste par l'artiste :
« Peindre c'est vivre, parce q'?il existe une vie qui n'est ni antérieure ni extérieure à l'acte de peindre. Une peinture qui ne concerne que la vie en tant que peintre. Une peinture d'abord sous la forme d'un écrit. Une peinture écrite, non décrite. Impossible de l'imaginer à la seule lecture du texte de la dm, il manque trop de choses et d'abord l'adresse. Je n'écris que concernant la peinture. Je renonce à l'œuvre picturale telle qu'elle est, une peinture qui s'encroûte. Elle ne peut figurer dans une rétrospective sauf à se fondre dans la couleur de toutes les dm présentes. Mettant cap au pire, j'évite toute nouvelle intrusion dans la bibliothèque déjà intransportable ; le pire étant que l'écriture conduit à me priver de l'acte de peindre, est-ce vraiment une privation? Quelle que soit la réponse, le renoncement ne sera effectif qu'après avoir repeint toutes les œuvres de 1958 à 1973.
Le moment le plus dur, ces dernières marelles, moment d'exaltation car à l'exact opposé de la soumission à un ordre extérieur désormais impossible, ma position, ouverture à partir de témoins directs, plus de 500 peintures repeintes, et leurs premiers preneurs en charge. Preuves de la persistance de l'ouverture risquée d'un ensemble de propositions encore à venir: ouverture à ce qui est ouvert. Les dm publiées, je suis maintenant impuissant à arrêter un processus qui m'échappe. L'acte de peindre continue hors et au-delà de moi. La biographie du peintre est celle de quelqu'un qui cherche un papier, il était là ce papier, sur la table, à côté du pot. Il n'a pas pu s'envoler.
S'il y avait biographie, ce ne serait pas la mienne. Ce serait celle des preneurs en charge, puisque l'écriture de la peinture m'aura permis de me retirer de la scène ».
Claude Rutault, la peinture fait des vagues, Musée des beaux-arts, Brest, 2007
Exposition du 9 janvier au 7 février 2015
Vernissage le 8 janvier 2015 de 18h à 21h en présence de l'artiste
Une toile tendue sur châssis, peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est accrochée.
Voici l'énoncé originel à partir duquel l'ensemble des définitions/méthodes de Claude Rutault se construisent depuis le début des années 1970, la définition/méthode étant le terme qu'il utilise pour désigner les écrits fixant le protocole de ses œuvres. En mars 1973, il repeint sa cuisine. C'est dans ce contexte somme toute assez ordinaire que l?artiste peint une toile de la même couleur que le mur de la pièce qu?il rénove, mur sur lequel la toile est accrochée.
Claude Rutault est peintre. Cependant, en instaurant avant toute réalisation picturale cet aujourd'hui célèbre protocole rédactionnel de la définition/méthode, il accorde une place prépondérante à l'écriture dans sa peinture.
Les définitions/méthodes en sont les exemples les plus notoires, mais il existe également dans le travail de Claude Rutault un ensemble conséquent d'écrits indispensables à l'appréhension de son œuvre. Marie-Hélène Breuil, auteur d'une thèse en histoire de l'art soutenue à Paris IV - Sorbonne en 2009 intitulée L'œuvre de Claude Rutault - définitions/méthodes: écriture, peinture, sociabilité, articule en partie son étude autour de l'hypothèse de l'élaboration d'une peinture écrite.
Léexposition En ce qui me concerne..., présentée à la galerie mfc-michèle didier, porte sur cette part constitutive - et considérable - de l'œuvre de l'artiste: la part écrite. Claude Rutault recourt, depuis le début des années 1970, à toutes formes d'imprimés - affiches, catalogues, livres, feuillets agrafés, cartons d'invitation - pour diffuser des textes de différente nature. L'idée même d'édition et de publication est au cœur de son œuvre.
« (...) depuis longtemps l'envie d'un livre qui rivalise avec la peinture, que l'écrit ne soit plus seulement un pont vers la peinture mais dispense de peindre, un livre qui ait les qualités visuelles, matérielles et cette portée irréductible d'une peinture, avec les armes qui sont les siennes, le papier, l'encre, les couleurs, les caractères, la typographie ».[1]
« (...) le lecteur/spectateur attentif se rendra compte que ces livres, catalogues ou fascicules vont bien au-delà de simples recueils de textes, de consignes. C'est une recherche formelle qui lie de façon conceptuelle ses écrits à sa démarche picturale »[2]. Claude Rutault cite Guy Schraenen dans sa «bibliographicitation 1973-2000 » publiée dans définitions/méthodes le livre.
À propos de la citation, vous remarquerez qu'elle est utilisée ici abondamment. Marie-Hélène Breuil souligne très justement, dans son Entretien écrit avec Claude Rutault[3], qu'il est difficile d'écrire sur l'œuvre de l'artiste «sans être dans la reprise» de ses propres commentaires ou dans la citation directe.
L'écrit est omniprésent. Il participe au renoncement de Claude Rutault à être peintre au sens traditionnel du terme, il lui permet d'abandonner les prérogatives liées à ce statut, de se dessaisir de l'autorité sur l'œuvre sans se dessaisir de l'œuvre.
La définition/méthode de 2009, intitulée premières pages I, met en avant ouvertement l'idée de publication, elle constitue l'essentiel de l'énoncé: « (...) l'œuvre est un livre ayant pour centre d'intérêt une peinture, il (le preneur en charge[4]) est l'auteur de l'un des livres qui va vers le Livre, c'est à dire l'œuvre avec une majuscule. Le Livre à l'image de la Peinture dont il parle, reste à venir ». premières pages I est un nouveau renoncement auquel Claude Rutault aspire, celui du «renoncement à avoir le dernier mot »[5].
L'exposition En ce qui me concerne... est une « prise en charge » de l'exposition imprimés 1973-2013, conçue par Didier Mathieu et présentée au Centre des livres d'artistes de Saint-Yrieix-la-Perche.
Elle sera présentée du 9 janvier au 7 février 2015 et son vernissage se déroulera le jeudi 8 janvier de 18h à 21h, en présence de l?artiste.
Le vernissage à la galerie mfc-michèle didier sera également l?occasion du lancement du catalogue de l'exposition de Claude Rutault imprimés 1973-2013 édité par le Centre des livres d'artistes de Saint-Yrieix-la-Perche et dirigé par Marie-Hélène Breuil et Didier Mathieu. Il prendra la forme d'un catalogue raisonné des livres, publications, ephemera et autres imprimés de l'artiste.
[1] Claude Rutault, seconde livraison (entrée « catalogue »), la peinture fait des vagues, Musée des beaux-arts de Brest, 2007
[2] Guy Schraenen, Claude Rutault bibliographie 1998, Neues Museum Weserburg Bremen, Brême, 1998
[3] Claude Rutault, Michel Gauthier, Marie-Hélène Breuil, Flammarion, 2010
[4] Le preneur en charge est le terme choisi par Claude Rutault pour identifier l?acquéreur d?une définition/méthode. Le preneur en charge a une part active dans l?existence de l??uvre de l?artiste.
[5] Claude Rutault, Michel Gauthier, Marie-Hélène Breuil, Flammarion, 2010
Note biographique sur l'artiste par l'artiste :
« Peindre c'est vivre, parce q'?il existe une vie qui n'est ni antérieure ni extérieure à l'acte de peindre. Une peinture qui ne concerne que la vie en tant que peintre. Une peinture d'abord sous la forme d'un écrit. Une peinture écrite, non décrite. Impossible de l'imaginer à la seule lecture du texte de la dm, il manque trop de choses et d'abord l'adresse. Je n'écris que concernant la peinture. Je renonce à l'œuvre picturale telle qu'elle est, une peinture qui s'encroûte. Elle ne peut figurer dans une rétrospective sauf à se fondre dans la couleur de toutes les dm présentes. Mettant cap au pire, j'évite toute nouvelle intrusion dans la bibliothèque déjà intransportable ; le pire étant que l'écriture conduit à me priver de l'acte de peindre, est-ce vraiment une privation? Quelle que soit la réponse, le renoncement ne sera effectif qu'après avoir repeint toutes les œuvres de 1958 à 1973.
Le moment le plus dur, ces dernières marelles, moment d'exaltation car à l'exact opposé de la soumission à un ordre extérieur désormais impossible, ma position, ouverture à partir de témoins directs, plus de 500 peintures repeintes, et leurs premiers preneurs en charge. Preuves de la persistance de l'ouverture risquée d'un ensemble de propositions encore à venir: ouverture à ce qui est ouvert. Les dm publiées, je suis maintenant impuissant à arrêter un processus qui m'échappe. L'acte de peindre continue hors et au-delà de moi. La biographie du peintre est celle de quelqu'un qui cherche un papier, il était là ce papier, sur la table, à côté du pot. Il n'a pas pu s'envoler.
S'il y avait biographie, ce ne serait pas la mienne. Ce serait celle des preneurs en charge, puisque l'écriture de la peinture m'aura permis de me retirer de la scène ».
Claude Rutault, la peinture fait des vagues, Musée des beaux-arts, Brest, 2007